ENTRETIEN: JEREMIE OWONO NGUEMA, LE MYTHE. À PROPOS DE LA NATION.



 ENTRETIEN: JEREMIE OWONO NGUEMA, LE MYTHE. À PROPOS DE LA NATION.

Bonsoir Jérémie! Comment vas-tu?


Salut! Je vais bien merci!

Qui est Jérémie Owono Nguéma?

Ouh!  Que vous dire ? Un citoyen gabonais, enseignant de philosophie, diplômé de l'U.O.B et de l'ENS. Plutôt libre-penseur...Pour le reste, je vous dirai que je suis plutôt passionné d'histoire et de poésie... 

Cela fait combien de temps que tu es enseignant de philosophie?

Depuis deux ans maintenant. Seulement, comme j'aime le dire,  pour moi la philosophie a toujours été une passion. Une passerelle qui m'a souvent permis de questionner ma propre existence...

Pour le jeune prof que tu es, comment vis-tu cette expérience professionnelle?

Franchement cela va ! J'ai plutôt de bonnes relations avec mes apprenants. Ben cela est peut-être aussi lié à mon histoire personnelle. Je suis issu d'une famille d'enseignants, et j'ai  toujours voulu être un enseignant comme mes parents. Du coup pour moi c'est toujours un réel plaisir. Mais c'est sûr, cela n'occulte en rien les difficultés liées à toutes les carences que vous connaissez tous.

Pour le philosophe que tu es, comment penses-tu être perçu par tes élèves?

Sans doute que cela va bien au-delà du simple enseignant que je suis. Au fond le philosophe est plutôt perçu comme un homme pas comme les autres... Un homme plutôt décalé. Mais bon on s'y fait, et les élèves finissent par comprendre qu'en vérité on est et reste d'abord un homme. Une personne avec des convictions, des aspirations fortes parfois mais aussi des faiblesses.
Si tu nous parlais de ta passion pour la poésie, pour l'écriture? 

Pour être franc cela dure depuis très longtemps. Mes années c .p.. Car aussi loin que remontent mes soigneurs, j'ai toujours écrit : mes peines et mes amours. Bruh pour rire,  je dois vous avouer que ma mère m'a souvent battu pour ces mots. Puis après j'ai lu un peu tous les classiques. Mais par-dessus tout, je crois que ma passion de la poésie est liée au fait qu'elle me permet d'exprimer avec lucidité et clarté ce que l'écriture en prose ne permet pas toujours à cause de ses règles, etc.

Tu as récemment sorti un livre, peux-tu nous en parler?

Plutôt un libre propos.Le Mythe. À propos de la Nation... Il y est question de ce que l'on peut qualifier d'une critique par le haut. Mon postulat de base est simple. Il est un peu fort, je crois...mais parfaitement assumé. Je vais de l'idée que la Nation gabonaise est une Nation rêvée, autrement dit que le Gabon est en réalité le pays que l'on aurait aimé avoir, mais qui en réalité n'existe pas. La faute à l'histoire politique, à la colonisation, mais aussi à nous tous... Les familles, l'école et le politique. C'est en cela qu'il nous revient de réaliser cette Nation.Le propos appelle ainsi à la constitution d'un imaginaire collectif patriotique qui puise ses ferments dans notre culture originelle et notre histoire vraie...et non point cette histoire galvaudée que l'on nous enseigne depuis si longtemps.

D'où te vient l'idée d'écrire un libre propos?

L'observation de ma société. Le manque de patriotisme tout à fait visible partout aussi chez les politiques que les populations. Mais c'est aussi le résultat d'une longue réflexion que j'ai eu depuis bien de temps. Celle que seule une conscience historique forte nous conduit au patriotisme véritable. Mais aussi que la fabrication de cette conscience historique ne doit pas être laissée au politique seul. Elle implique la partition de la famille, de l'école et des médias.
Quelles sont tes attentes après la parution de ton libre propos?

Les attentes ? Que le message passe... Qu'il soit d'abord lu, puis compris. Et en tant qu'enseignant que l'I.P.N réorganise nos programmes scolaires en les rendant plus contextuels. Et peut-être au final que l'État s'engage à vulgariser notre histoire pour nous permettre de constituer une braie histoire commune.

Voudrais-tu nous faire comprendre que la nation gabonaise est à refaire? 

Comme je vous l'ai dit d'entrée de jeu, pour moi l'idée de base est simple : le Gabon en tant qu'espace géographique existe bel et bien. Mais la Nation gabonaise en tant qu'état-nation est à construire, à bâtir en partant de la constitution d'une conscience collective commune... C'est la raison pour laquelle pour moi il est impérieux de reconquérir notre histoire commune authentique.

La colonisation par exemple est une partie de notre histoire commune, es-tu pour la sauvegarde ou pour le déni de cette partie de notre histoire?

Il est clair que la colonisation fait partie de notre histoire, à ce titre elle est à raconter. Mais cela de manière fidèle. Et l'autre aspect tout aussi important à mes yeux est qu'il sied également de dire que la colonisation en tant processus a travaillé à l'effacement de notre histoire originelle si vous permettez l'expression. Et ce, au point qu'il suscite aujourd'hui une confusion entre l'histoire de l'Afrique et l'histoire de la colonisation. Il faut restituer les événements de manière lucide. La colonisation ne doit pas nous faire oublier notre histoire originelle.

Revenons à ton libre propos, comment fait-on pour se le procurer?

Il est disponible à la librairie centrale de l'Université Omar Bongo..

À quel prix?

Ouh! 4000 francs... Je crois que c'est accessible pour tous...Tout à fait. Quel est de façon générale ton regard sur la littérature gabonaise?Question sensible... Mais bon, je vais me jeter à l'eau comme dit. C'est une littérature plutôt féconde, mais qui devrait à mon humble avis résolument s'engager pour dire un peu plus clairement les choses...Si, vous me permettez... Je voudrais aussi faire remarquer le fait qu'elle doit être de plus en plus et de mieux en mieux enseignée pour qu'elle pénètre l'imaginaire collectif. 

Penses-tu que les œuvres gabonaises n'a pas de lecteurs?

Bien que si ! Vous et moi, autrement dit que cette littérature est connue par une sorte de classe intellectuelle. À mon avis, elle n'est pas encore assez présente dans nos écoles primaires, nos collèges et nos lycées de manière à faire que la jeunesse soit interpellée et pénétrée par elle.

C'est pour quand ta prochaine parution?

Ouh! Attendons de mûrir d'autres intuitions... Mais bon d'ici là. 

Merci pour ta disponibilité!

Merci à vous! 


Lbvlife février 2017. 

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